Samar Chaaban
Née en 1993 à Paris, dans le 13e arrondissement, de parents mexicains et libanais engagés dans les luttes anti-impérialistes, Samar est poète (ou poémiste) dans les heures volées au capital, lorsqu’elle ne travaille pas dans le secteur associatif en gestion de projets. Marquée par la disparition brutale de ses deux parents ces dernières années, elle cherche à tisser une poétique de l’absence et à explorer la transmission intergénérationnelle des luttes que permet cette filiation. Des montagnes sous la langue sera son premier recueil publié.
À quoi bon la littérature ?
à incendier les sanctuaires mortifères et tracer nos points de fuite loin de l'assignation annihilante des empires.
L’acte d’écriture est-il un acte d’engagement ?
l'écriture est un acte de création, et toute création engage une responsabilité envers le monde.
si cet acte épaissit l'abject et alimente l'ordre dominant, alors il se transforme en allégeance aux forces oppressives, un geste de destruction complice et bourgeois.
écrire depuis le feu et les cendres de cette matrice, c'est choisir de créer du côté du non-humain soit du possible. c'est l'acte de création même.
Qu’est des montagnes sous la langue pour toi ?
la fissure qui fend la poitrine de la terre, plie et déplie les sols, modelant les possibles. c'est la sortie du volcan où j'ai trouvé refuge, l'extension du dernier souffle des absent·es, la première inspiration d'une renaissance. un je dont l'écho résonne toujours en nous.
c'est un fragment de paysage arraché au vide de nos existences, une tentative pour rendre tangible une géographie habitée par nos histoires, nos sensibles, nos beautés. un vol, tantôt armé, tantôt fleuri, pour reprendre et réinventer notre droit à la permanence.un espace-temps où nos pieds peuvent enfin cheminer à nouveau, errer et tracer des sentiers — peu importe lesquels, pourvu qu'ils témoignent de nos lignées, de nos victoires, de nos regards.
des montagnes sous la langue c'est la marcescence de l'amour filial reçu : un amour profondément révolutionnaire, car il révèle, sans relâche, la mémoire d'un désert qui nous a enfanté·es.